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James Stewart “Quand Ryan Dungey m’a percuté, c’était la fin pour moi”

James Stewart, suite, et fin.

Le troisième – et dernier – épisode de la Saga James Stewart est là, c’est tout frais, c’est traduit en Français, et c’est parfait pour bien commencer le week-end.

Episode 1 partie 1
Episode 1 partie 2
Episode 2

Les suspensions, ça craint …. Je ne sais pas si je l’ai dit auparavant… Je sais que je l’ai dit à certaines personnes … Mais cette suspension a plus ou moins ruiné le reste de ma carrière.

D’une, je ne suis pas un tricheur et même les gens qui m’ont suspendu le savent mais la façon dont les règles sont faites, et sont toujours, ça nous montre à quel point c’est peu professionnel.

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On est directement désigné comme responsable. J’ai fait une erreur en n’envoyant pas certains documents, ils ont fait une erreur en ne me disant pas qu’il fallait les envoyer …. Beaucoup de choses sont arrivées à ce moment-là et j’ai le sentiment que ça a coupé court à ma carrière.

Début 2015, la façon dont je me sentais, la façon dont je roulais, à l’approche de la saison, même fin 2014, je sentais que je pouvais être l’ancien James de 2007 ou 2009, gagner au moins 10 courses, j’avais mon programme, j’avais ma moto bien réglée, j’étais en confiance même si je n’avais pas gagné le championnat l’année précédente, mais je m’étais prouvé pas mal de choses.

Ça craint car quand tu comprends les détails et que tu te plonges vraiment dedans tu réalises que c’est comme de la politique, il y a des vices cachés. Je ne comprends pas par exemple pourquoi, quand tu essayes de faire appel ou de prouver que tu es innocent, tu prends des mois de suspensions en plus. J’ai dû faire face à çà, ils ne voulaient pas que ma suspension soit de 16 mois, ils voulaient qu’elle soit de 24 mois car j’allais faire appel de leur suspension.

C’était une perte de temps, d’argent, j’allais être suspendu de toute façon. C’est malheureux et c’est décevant, regarde Broc Tickle et ce qu’il traverse, je ne sais pas si les choses ont changé depuis mais en gros, sa carrière est finie. Peut-être juste à cause de quelque chose qu’il a mangé, qui sait ?

Ma carrière a été ruinée, dans un sens, car je n’avais pas rempli tous les documents ! Les trucs pour lesquels j’étais suspendu, j’avais le droit de les utiliser si je remplissais les papiers, ça n’a aucun sens, mais les règles sont les règles et la personne fautive dans cette situation c’était moi. Je suis celui qui n’a pas fait ce qu’il fallait faire, j’aurais dû lire plus à ce sujet.

Ça m’a dégoûté, je sais comment je roulais, je connais l’histoire … Ils savent que je n’essayais pas de tricher, je sais que je n’essayais pas de tricher, mais c’était sans importance. Maintenant on est en 2019, tout le reste, c’est de l’histoire ancienne.

Ça a coûté à beaucoup de gens, dont moi, les gens auraient pu avoir plus de chances de me voir rouler tu sais, et gagner, je ne serais pas là aujourd’hui avec 50 victoires, j’en aurais plus. Si l’on parle strictement de l’aspect compétition, la suspension était compliquée car à ce moment-là, je n’avais rien d’autre que ça en tête.

Je me suis fait suspendre juste quelques semaines avant Anaheim, j’avais fait tout le boulot, je m’étais entraîné, l’équipe avait commandé toutes les pièces car on ne savait pas à cette époque qu’on n’allait pas rouler, on n’avait pas eu la réponse finale. Donc on s’est préparé jusqu’à Anaheim pour apprendre que finalement, on ne roulerait pas.

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Être suspendu en fin de compte, c’est la meilleure chose qui me soit arrivée, honnêtement. Ma vie personnelle a totalement changé … Je ne serais pas père aujourd’hui si je n’avais pas été suspendu. Mon entreprise, Seven, n’en serait pas là aujourd’hui si je n’avais pas été suspendu. Je ne serais pas au courant de tout ce que je sais aujourd’hui si je n’avais pas été suspendu.

En tant que pilote, ça craint, mais quand une porte se ferme … pour moi, c’était comme si 5 autres s’étaient ouvertes. Dans un sens, ça m’a permis de devenir humble, plus à l’aise avec les gens, plus proche des gens dans l’industrie. Beaucoup de gens, même s’ils n’étaient pas fan de moi à la base ont fini par m’apprécier …

Tu vois, je pensais que certaines personnes me détestaient, des managers, des pilotes, et au final ça nous a tous rassemblé car ils savaient que ce qu’il m’arrivait n’était pas juste, ils savaient que je n’étais pas un tricheur et honnêtement je pense que ça a ouvert des yeux  de beaucoup de gens, pour que personne ne se fasse suspendre par la suite.

Ils avaient vu ce par quoi j’étais passé, donc au final, il y a aussi eu du positif dans le fait que ça m’arrive. Principalement, le fait que je devienne père, c’est clair, ça ne serait pas arrivé sinon, et puis mon entreprise.

Quand je regarde en arrière avec le recul, je me rends compte qu’avoir mes enfants, c’est la chose la plus importante que je n’ai jamais faite, c’est devenu la chose la plus importante, mes enfants.

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2016, après ma suspension et avant Anaheim 1, il y avait beaucoup de choses que je voulais faire. La présaison ne s’était pas bien déroulée, j’ai été blessé. Je me suis blessé à Paris, je me suis blessé chez moi et on a changé les suspensions, je galérais avec les fourches, les fourches à air, c’était compliqué.

Je me pointe à Anaheim, et j’étais plutôt excité par le fait de rouler de nouveau. C’est à ce moment-là que j’ai appris que j’allais être père, j’étais content. Le fait d’être suspendu avait changé ma façon de voir les choses, et j’avais trouvé d’autres centres d’intérêt. Personnellement, j’étais épanoui et plus heureux et j’essayais de m’éclater.

À Anaheim 1, je me qualifie 3ème au chronos je crois, la heat race ne se déroule pas très bien et lors du second tour de la finale je me fais sortir par Dungey, tout le monde sait ce qui s’est passé, je me retrouve inconscient sur le circuit.

Quand Ryan m’a percuté et qu’il m’a assommé, c’était fini. Je ne l’ai pas réalisé sur l’instant mais c’était la fin de James Stewart.

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Le temps qu’il m’a fallu pour me soigner. C’était une des pires commotions cérébrales que je n’avais jamais eues, ça m’a pris vraiment longtemps pour revenir. Plusieurs semaines plus tard je n’étais toujours pas prêt. J’ai essayé de m’entraîner pour rouler à San Diego et ce n’était toujours pas bon. J’étais 3ème ou 4ème à Oakland et j’ai dû sortir de la piste car je me sentais mal.

Je ne sais pas ce qui se trame dans ma tête à ce moment-là, peut-être le fait que j’allais être père, je ne sais pas ce que c’était, le fait que je ne me sente pas super bien sur la moto, pas bien physiquement, même si les tests montraient que j’allais bien, je pense que le poids était trop lourd.

Je venais de me faire suspendre, j’étais excité à l’idée de revenir rouler et il m’arrive ça, tout s’effondrait. En y repensant maintenant, je réalise qu’au moment où Ryan Dungey m’a percuté, c’était la fin pour moi.

Ryan m’a probablement fait une faveur maintenant que j’y pense car j’allais beaucoup tomber, vu les réglages de la moto et le fait qu’on galérait. Je sais que je ne suis pas fou, il y a eu des gens après moi qui ont eu les mêmes problèmes sur la moto.

Je pense que cette année-là, je me serais retrouvé dans la même situation qu’en 2005 contre les 4 temps, à essayer de sur-rouler sur une machine qui je savais n’étais pas parfaite. Il y avait beaucoup de pression sur mes épaules pour que je revienne, j’avais été suspendu, il fallait que je revienne au même niveau qu’en 2014, tout ça aurait fini par peser dans la balance. Ryan m’a fait une faveur, honnêtement.

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C’est dur de parler quand tu n’es pas à 100% sûr de ce que tu dis. Toute ma vie, j’ai pensé à ce que j’allais dire, et j’ai repensé une deuxième fois avant de le dire, puis une troisième fois avant de le dire car peu importe ce que j’allais dire, il fallait que je fasse face aux réactions des gens, aux mauvaises interprétations. Je n’ai jamais planifié de passer autant de temps sans parler mais honnêtement je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. Une part de moi voulait encore rouler, et j’ai essayé tu sais.

J’ai essayé de monter ma propre équipe, je voulais rouler à ma façon, j’étais fatigué de devoir me plier à la démocratie du sport, j’étais fatigué de devoir faire certaines choses, de devoir ressembler à ci ou ça. Toute ma vie, j’ai été quelqu’un de différent et quand j’ai eu la chance de pouvoir démarrer Seven, je l’ai fait car j’étais fatigué de la façon dont les entreprises font leurs business. …

Quand je suis revenu, j’ai essayé de démarrer une équipe qui serait différente mais malheureusement ça n’a pas marché pour certaines raisons mais jusqu’à peu, j’essayais de trouver un moyen pour rouler.

Maintenant, je suis content, mes enfants sont contents, je suis à l’aise avec le fait que la moto et moi, c’est terminé, je veux passer à autre chose. C’est pourquoi je parle maintenant, je sais à 100% ce que je veux faire dans la vie. Je ne veux plus faire tout ça.

Si je ne suis pas sûr, si j’ai un doute sur ce que je vais dire, alors je préfère ne rien dire. Car je ne veux pas avoir à revenir en arrière, donc c’est une de ces choses, c’est le moment.

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J’imagine que c’est à ça que sert cette interview, ce pour quoi je parle, le fait que maintenant, je sache ce que je veux faire dans la vie. On arrive à la fin, ou au début, c’est comme on veut.

Vous me voyez, je suis un peu gros, mais je suis content, je sue comme si j’étais en train de passer un contrôle de math, c’est probablement à cause des Cheetos que j’ai mangés, si je descendais maintenant, j’irais manger des chicken wings là tout de suite. Plus sérieusement, à un moment, c’est venu, à un moment, j’ai su.

Je ne voulais plus être parfait, j’ai fait beaucoup de choses, bien plus que ce que je n’aurais pu penser faire. J’ai rencontré des gens, j’ai voyagé à travers le monde, je n’en avais même pas rêvé.

Je suis un gamin de Haines, je ne comprenais pas pourquoi les gens me traitaient différemment alors que je faisais la même chose que le mec d’à côté, toutes ces choses, ça m’a aidé, ça a fait de moi qui je suis aujourd’hui. Ça va m’aider à vivre ma vie de la meilleure façon possible, ça va m’aider à éduquer mon fils.

Mais je suis fatigué, fatigué de devoir me soucier de ce que pensent les gens, je suis fatigué de me lever le matin et de devoir m’entraîner, de me lever le matin et de me demander comment je vais pouvoir dire ci ou ça.

Je veux me soucier seulement de ce que je vais manger, car aujourd’hui c’est ce qui importe, de ce que fait mon fils et du terrain de golf ou je vais aller m’entraîner. En dehors de ces 3 choses, je ne veux me soucier de rien d’autre.

C’est ce pour quoi j’ai fait ce que j’ai fait ces 30 dernières années, à suer, à pleurer, à rouler en moto, ça a été génial. Mais aujourd’hui, c’est terminé, je ne veux plus faire ça.

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Tout ça pour dire, je prends ma retraite, c’est le moment. J’ai pris ma retraite et c’est vraiment dur, c’est sûr, car j’aime la compétition, j’aime les fans, j’aime les cérémonies d’ouverture, j’aime les gens qui m’encouragent, j’aime les lignes d’autographes devant moi.

Mais l’entrainement, la sueur, les larmes, ça ne me manque pas. Devoir penser que je dois gagner chaque course, devoir être James Stewart, je n’aime plus ça. J’ai un fils, j’ai des enfants, j’en suis responsable maintenant, la vie continue, les choses changent, mon nouveau but dans la vie, c’est d’élever mes enfants, et c’est ce que je vais faire.

Tu me verras probablement plus sur les circuits à partir de maintenant que ces dernières années car cette décision était difficile et que je n’étais pas sûr, mais maintenant j’en suis sûr.


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