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Sans détours – Dylan Ferrandis (2/2)

Sans détours – Dylan Ferrandis (2/2)

Suite et fin de notre entretien avec Dylan Ferrandis. (Retrouvez la première partie en cliquant ici).

Dans de cette seconde partie, Dylan vous parle de sa rivalité avec Adam Cianciarulo et Jeffrey Herlings, on revient également sur l’avenir du pilote Star Racing et sur sa virée chez les Deegans. On mentionne le team-manager de Star Racing Yamaha – Wil Hahn – ainsi que la relation du tricolore avec son coéquipier Justin Cooper. Inévitablement, on fait un détour par l’incident avec Christian Craig et on évoque l’animosité des fans Américains. On fait également un crochet par les entraînements avec David Vuillemin et la collaboration avec Gareth Swanepoel lors des débuts aux USA avant d’attaquer quelques anecdotes … Micro

[…] Tu as jeté un oeil sur le début de saison d’Adam Cianciarulo ? Tu en as pensé quoi ?

Bien sûr, je regarde toutes les courses. Dès que j’ai terminé ma finale 250, je vais sur mon téléphone, je vais sur NBC Sports et je regarde la finale 450, c’est obligatoire. J’ai tout vu, tous les essais, tous les trucs techniques qu’Adam a fait de mieux que les autres.

Je pense qu’Adam est dans la continuité de ce qu’il a fait l’année dernière. L’an dernier, on avait un gros niveau, je roulais bien et il m’a quand même battu. Je ne dirais pas que je ne pouvais rien faire, mais il était aussi rapide, parfois plus rapide que moi.

J’étais à fond l’an dernier, je donnais tout et lui aussi. Il est resté sur sa lancée avec son gros niveau, il a continué son entraînement et il a fait une bonne transition, ça montre que le niveau en 250 est aussi bien relevé.

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L’an dernier, aux chronos, c’était de la folie. On signait des temps hallucinants, limite plus rapide que les 450.

Je me rappellerais toujours de Houston 2019. Je fais un chrono de malade et il me bat le tour suivant. Je repars et je tombe. Je n’étais pas capable d’aller plus vite, il m’avait battu aux chronos. Le soir, c’est moi qui gagne la finale mais je me demandais vraiment comment il avait fait pour rouler plus vite aux chronos, j’étais vraiment à la limite de la perfection partout.

Notre niveau était exceptionnel l’an dernier, il a continué à travailler et il a montré que c’était possible de faire de belles choses dès la première année en 450.

Du coup, quel pilote t’a le plus poussé dans tes retranchements ? Un Herlings, ou un Cianciarulo ?

Difficile à dire, c’est 2 mondes différents. En grands prix, on n’était peut-être pas à armes égales avec Jeffrey et je pense que la KTM a toujours eu un avantage par rapport aux autres marques. Nous, on bossait dur avec Kawasaki pour combler l’écart. C’était dur de les battre sur tous les terrains.

Je n’ai pas vraiment eu de grosses bagarres avec Jeffrey, quelques-unes, mais il a souvent été plus fort, le niveau était différent, je n’étais pas assez fort physiquement à cette époque-là. Aujourd’hui, ce serait différent.

J’ai toujours eu de grosses bagarres avec Adam. J’ai été derrière les deux pilotes, et je pense pouvoir dire que Jeffrey, c’est le plus gros morceau.

Jeffrey était plus dur à battre à l’époque qu’Adam ne l’était l’an dernier, et j’imagine que ça ne s’est pas arrangé avec le temps (rires).

Adam et Roczen sont potes depuis des années, ils ont beaucoup roulé ensemble à l’intersaison, cette relation, ça l’a beaucoup aidé ? Tu vas pouvoir compter sur quelqu’un dans ce sens ?

Forcément, rouler avec des meilleurs pilotes ça aide. Après, je sais que moi, je n’en serais pas capable. Je préfère m’entraîner dans mon coin, tout seul, que personne ne me regarde, ne pas avoir un pilote auquel me comparer, pour pouvoir travailler sur moi-même et sur ma technique.

La Baker’s Factory, Moto Sandbox, je sais que ce n’est pas pour moi. J’aurais beaucoup de mal à rouler tous les jours avec mes adversaires. Pour te dire, depuis qu’on a repris l’entraînement SX, je demande le jour d’entraînement de mes coéquipiers pour ne pas avoir à rouler avec eux, simplement car j’aime m’entraîner seul.

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J’aime faire mon truc dans mon coin, prendre la piste à l’envers, faire des trucs différents et être tranquille.

Je pense que cette relation avec Roczen l’a aidé, mais ça dépend aussi de ton caractère. Ils ont un complexe exceptionnel pour s’entraîner, et ça, ça aide. Avoir Roczen comme partenaire d’entraînement, ça ne peut qu’être bénéfique, mais sur le long terme, c’est épuisant mentalement.

Dylan Ferrandis – @MathieuLifestyleFilms

En général, les pilotes aiment bien s’entraîner avec d’autres gars pour avoir des points de repère, pour ne pas perdre l’intensité. Mais toi, c’est l’inverse.

Ça, c’est parce qu’ils n’ont pas les bons entraîneurs.

Le plus gros point fort de David, c’est de travailler sur le pilotage, sur la technique. Il va te faire gagner du temps sur des petits secteurs, sur de simples enchaînements, des virages, il est très fort la-dedans.

Ça, c’est ce que les pilotes Américains et leurs entraîneurs ne travaillent pas.

Eux, ils font des manches, du physique, de la répétition, alors que nous, on peut faire des entraînements sans faire une seule manche dans la journée. On travaille sur la vitesse, sur la technique, et David cherche toujours le petit détail qui va faire la différence.

Je suis 100% en accord avec son approche, c’est ce qui fait la différence. Le jour où t’es rincé, que tu roules mal et que tu te prends 2 secondes au tour, aucun intérêt à t’envoyer des manches.

Quand tu travailles avec un entraîneur qui suit plusieurs pilotes, tu ne peux pas faire ça. Tu suis le groupe, tu fais la même chose, et si tout le monde fait n’importe quoi, tu fais n’importe quoi avec eux pendant 20 tours.

Nous, c’est notre vision du sport avec David, et je pense que ça marche.

Quand tu es arrivé chez Star Racing, c’était Gareth Swanepoel qui entraînait les pilotes ? Ça n’a pas fonctionné ?

Lors des premiers contacts avec l’équipe Star Racing, les pilotes gagnaient tout, et l’entraîneur, c’était Gareth Swanepoel.

Forcément, tu te dis que le mec est bon et que l’entraînement qu’ils font, c’est de la folie. L’équipe m’a demandé si je voulais rentrer en contact avec Gareth, j’ai dit oui. Le mec était venu en GP, il a roulé aux USA, il sait ce que c’est de tout quitter pour sa carrière, il s’occupe de pilotes qui gagnent, bien sûr que je veux rouler avec lui.

C’est lui qui nous a récupéré quand on est arrivé à l’aéroport, on a passé beaucoup de temps chez lui, il nous a beaucoup aidés.

À l’entraînement, Gareth avait tous les pilotes du team Star Racing Yamaha en plus de Cooper Webb. On faisait beaucoup de trucs répétitifs, on partait en file indienne pour s’enfiler des manches, c’était binaire, très simple.

Au début, j’étais ok, mais j’ai vite senti que je ne pourrais pas faire de test suspensions de mon côté car il fallait suivre ce programme, je ne pouvais pas faire de choses différentes, des choses en plus.

Les pilotes n’étaient pas vraiment sérieux, pas très assidus, ils arrivaient en retard aux séances de sport, et ça a fini par m’énerver au plus haut point.Il y avait pas mal de petits trucs que je n’aimais pas trop dans son programme et je ne me voyais pas continuer comme ça.

Il coutait très cher et il avait tendance à s’occuper mieux de celui qui le payait le plus, et forcément, c’était Cooper Webb qui à l’époque venait de monter en 450.

Je lui ai dit clairement que je préférais arrêter, que ça ne me convenait pas. Il comprenait, il avait trop de pilotes et ne pouvait pas tout gérer.

J’ai décidé de partir de moi-même avant de contacter David, ça s’est fait par la suite, mais s’il m’avait dit non, j’aurais pu me retrouver sans entraîneur.

Dylan Ferrandis – Supercross Paris 2019 – @Mathieu LifestyleFilms

Un mot sur la vidéo où tu roules chez les Deegans. Brian Deegan, ce n’était pas le plus fort dans le domaine du Freestyle, mais il s’est créé une image, c’était un mec qui faisait du marketing. On a l’impression qu’il fait pareil avec ses enfants. Quand tu as roulé chez eux, que tu as vu les moyens mis à disposition d’un gamin comme Haiden, qu’est-ce que tu t’es dit ?

Déjà, j’ai contacté Brian car je n’avais aucun endroit pour rouler car tout était fermé, et il a gentiment accepté, c’était sympa de sa part.

Ensuite, quand tu arrives chez eux, tu deviens envieux…. C’est incroyable !Abusé, le paradis.

Si moi j’habitais là-bas, je ne sortirais plus jamais de chez moi jusqu’à la fin de mes jours. Il y a X terrains de moto, les collines, un skatepark, un immense garage avec absolument tout ce qu’il faut.

Quand j’étais petit, Brian, je le kiffais. Comme tu dis, il s’est créé une image de folie mais il a quand même bossé dur, il a envoyé des gros tricks, il a gagné une finale en SX, il s’est investi. Je pense qu’aujourd’hui, tout ça, c’est son gagne-pain.

Cette image et ce visuel, ce sont ses revenus, il ne travaille pas et il faut bien nourrir toute la famille. Il fait ça pour gagner sa vie.

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Le petit, il fait de la moto depuis toujours, il va forcément essayer de percer dans ce sport. Est-ce qu’il va y arriver ? Je n’en sais rien, en tout cas, il a toutes les cartes en mains.

Brian le dit lui-même, il sait que son enfant est trop gâté et que ce n’est pas comme ça que ça fonctionne, mais qu’est-ce que tu veux, quand tu as des enfants, tu veux tout donner pour eux. Si Haiden y arrive, tant mieux, s’il n’y arrive pas, ce sera comme ça. Je pense qu’il a la tête sur les épaules.

Le petit est encore trop jeune pour s’infliger un régime militaire comme moi je le fais. C’est encore trop tôt. Qu’il s’amuse, il a encore le temps.

Le moment venu, il faudra qu’il soit capable de bosser dur, et là, on verra.

Cette année, il y a eu l’incident avec Craig qui a mis le feu aux poudres. Mais comment ça se passait avant ça pour toi, est-ce que tu ressentais de l’animosité de la part des fans Américains envers toi ? À part Les types à Southwick l’an dernier …

Moi, j’ai toujours été super bien accueilli par les Américains. Ils ont toujours été super cool avec moi, me disant qu’ils adoraient les mecs qui venaient d’Europe pour se battre contre les Américains. C’était le discours.

Tu sais comment je roule, je donne tout et je fais le point après, et s’il y a des dégâts sur la piste, eux ils adorent ça en fait.

Ils ont toujours kiffé mon style de pilotage, mon agressivité, ce côté “je donne tout”.

À Southwick l’an dernier, il y’a eu ces mecs qui me faisaient des doigts d’honneur, trois fois rien. Des rednecks, tu en trouves partout, dans tous les pays; il y aura toujours quelqu’un qui ne t’aimera pas.

Les mecs me faisaient des doigts du premier tour des essais jusqu’au dernier tour de la deuxième manche. Je ne suis pas comme certains pilotes à vouloir jouer au type parfait. Si tu me fais un doigt à tous les tours, je vais te faire comprendre que je m’en balance et je vais t’en faire un en retour. C’est ma mentalité. Les Ricains ont vu ça, ils ont kiffé, aucun souci.

Avec Craig, il s’est passé ce qu’il s’est passé, mais finalement, je n’en veux à personne et cet incident ne m’a pas affecté.

Saturday Night Live: Anaheim 2 - Supercross - Racer X Online

Dylan Ferrandis – Christian Craig – 2020 – @RacerXOnline

Certains ont cru que Jett Lawrence était tombé à cause de moi, ils n’ont pas tout compris. Il y a eu un gros contact avec Craig, on a donné nos points de vue, mais ça c’est passé comme ça pour diverses raisons.

L’appui dans le virage était merdique toute la journée, l’angle du virage était pourri, il y a eu plein de choses.

Honnêtement, je suis dans n’importe quel championnat de France, et un étranger fait tomber un Français … On fait quoi ? On va faire pareil. On va le huer, mais c’est plus pour rigoler que méchamment. Ça a pris de l’ampleur sur les réseaux sociaux mais au final, les mecs de l’industrie m’ont tous soutenu.

Lors des épreuves suivantes, les gars voulaient toujours des autographes, des photos, il ne s’est jamais rien passé. Une fois, un mec à San Diego m’a fait un doigt d’honneur en face à face, je lui en ai fait un et c’était réglé [rires].

Quand t’es fans, t’es fans, ceux qui étaient dans le stade à Anaheim 2 et qui m’ont hué, ils se sont laissé entraîner par les autres. Je les comprends, je pense que j’aurais fait la même chose.

Ça ne va pas changer ma carrière et ça n’a pas changé mon bonus en fin de course.

Et un mot sur la relation avec Justin Cooper ?

Les gens pensent qu’on a un problème, enfin, je ne sais pas exactement ce qu’ils pensent, mais c’est sûr qu’on ne donne pas l’image de deux bons potes. Pour moi, il a déconné la saison dernière à Ironman, lors de la dernière épreuve.

Sur le papier, je l’ai battu quasiment tous les weekends, j’étais plus fort que lui au championnat, je jouais le titre et lui non. On n’a pas aimé qu’en première manche, alors que j’étais premier et lui second, il ait tout donné pendant les 15 premières minutes pour me doubler, quitte à prendre des risques.
Il n’avait aucun intérêt à faire ça, on sait qu’il tient bien moins les manches que moi physiquement, c’est l’outdoor, on sait que c’est dur, qu’il faut éviter de se cramer en début de manche.

Il m’a doublé à la régulière, il s’est arraché pour me contenir quand je revenais, j’ai fini par le redoubler car sur la fin de manche, j’étais plus fort, et trois virages plus loin, Adam le passe, et lui, il ne donne pas son maximum pour l’empêcher de doubler.

Si je gagne la première manche à Ironman et que Justin termine second, Adam n’est pas champion au terme de la première manche. C’est ce que le team et moi, on n’a pas apprécié. Justin a tout donné contre moi, et pas contre Adam, et on a trouvé ça dommage. Après ça, la journée a été tendue.

Je pense qu’il n’a pas assez analysé la situation, il n’a pas vraiment fait d’effort. On est dans la même équipe, si l’équipe Star gagne un titre à Ironman, c’est bénéfique pour tout le monde, même si ce n’est pas lui qui décroche ce titre. Il a été un peu égoïste, mais on est tous un peu égoïste dans ce sport.

Sur le Supercross, on est sur la même côte, tout se passe bien. Justin ne fait aucun effort pour qu’on soit ami, mais bon, on n’est pas vraiment là pour se faire des potes.

Dylan Ferrandis – Supercross Paris 2019 – @Mathieu LifestyleFilms

On parle beaucoup de gars comme Payton, De Coster, mais on n’entend rien sur Wil Hahn. Il est comment, Wil, en tant que team manager ? Avec son passé de pilote – récent – ça doit l’aider à encore mieux cerner vos besoins.

Il y a Bobby Regan, c’est le big boss, le propriétaire de l’équipe.

Ensuite, Brad Hoffman, c’est le chef d’équipe, le gars qui tape du poing sur la table. Brad était team-manager, mais son rôle principal, c’était plus de faire les moteurs, régler les CDI, les réglages pointilleux, il met la main à la pâte pour les suspensions, il chapeaute un peu tout le team et gère l’aspect technique et mécanique.

Il était toujours débordé, il avait toujours trop à faire. C’est pourquoi Wil est arrivé. Il était assistant team-manager la première année – sur le papier – mais c’était lui qui faisait le boulot du manager.

Wil, c’est vraiment l’homme à tout faire, il gère toutes les choses que personne ne veut gérer, c’est un élément très important et toute l’équipe lui doit beaucoup. C’est lui qui va arroser le terrain Yamaha la veille des entraînements, c’est lui qui gère les press-day, les médias, tous ces trucs un peu chiant qu’on n’a pas envie de faire. Il se donne corps et âme dans son métier, il sacrifie sa vie personnelle pour ça.

Wil, il a tout vécu, il est passé par les blessures, il sait comment ça fonctionne avec son passé de pilote, il sait ce qu’il faut pour nous.

Bon, parfois, on s’embrouille un peu, mais c’est aussi parce que je suis du genre casse burnes. “Si tu veux que je gagne samedi, ne m’oblige pas à faire ça”. Il va faire passer les sponsors avant le reste, mais bon, c’est normal, c’est son boulot, on ne peut pas lui en vouloir.

Au niveau du futur, tu te vois où, toi, dans 10 ans ?

On y réfléchit, c’est compliqué. On aimerait rentrer en France une fois ma carrière terminée mais d’un côté, on a vraiment une belle vie ici. On aimerait bien tout plaquer et vivre sur une île aussi, on a plein d’idées, ce qui fera la différence, c’est le nombre de titres, et le nombre de chèques qu’on aura encaissés dans les prochaines années, on verra.

On ne te verra pas faire ton Chad Reed en SX US à 37 ans j’imagine ?

Non, pas jusqu’à 37 ans. J’aimerais pouvoir continuer le plus longtemps possible, c’est sûr. Le problème, c’est que le Supercross – et l’outdoor aussi – c’est tellement exigeant que c’est presque impossible de tenir autant d’années au top.

Il y a pas mal de trucs que j’aimerais bien faire quand je prendrais ma retraite sportive. Des trucs comme le Touquet, des choses un peu hors du commun qu’il faut faire une fois dans sa vie. Je pense que je ferais quelques trucs cool dans les années qui suivront ma carrière de pilote.

J’ai gagné le Touquet en Junior par le passé, j’en garde un super souvenir, c’est pourquoi j’aimerais bien pouvoir le faire.

Dylan Ferrandis s’offre son premier Touquet

Dylan Ferrandis – Touquet Junior 2011 – @SudOuest.Fr

On y a en partie répondu, mais je vais te la poser quand même: Aurais-tu eu le même train de vie qu’aujourd’hui si tu étais resté en Europe ?

Absolument pas. Partir aux USA, ça a été la meilleure expérience que je pouvais avoir sur tous les points de vue. Ça m’a ouvert les yeux, ça m’a permis de comprendre beaucoup de choses, pas qu’en moto, mais sur la vie en général.

Ça m’a fait comprendre pourquoi il faut bosser dur, pourquoi il faut se lever le matin, ce que le travail peut rapporter, et puis il y a l’aspect financier.

Ce titre l’an dernier …. Sur le plan sportif, c’est exceptionnel, mais sur le plan financier, c’est dingue. Depuis ça, on est vraiment tranquille, c’est un truc de fou. On est presque devenu riche du jour au lendemain, tous ces sacrifices …

D’un coup, en une soirée, tu reçois un chèque de 350.000$ et ta vie change. J’ai tout quitté, j’ai tout sacrifié pour ça et je n’ai aucun regret, je suis très heureux de l’avoir fait et ce serait bien que le monde entier prenne conscience que c’est possible, il faut bosser dur pour pouvoir y arriver, mais si tu bosses assez dur, ça le fait.

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Cette vidéo de Raphael Sauze qui est ressortie ces derniers temps, où on te voit faire du SX en 85cc dans ton jardin, quand tu la revois, ça te fait quoi ? Ce dont tu parles dans ta vidéo en étant gamin, ça y’est, c’est là, tu as réussi.

C’est beau, ça me prend aux tripes. Bon, je n’aime pas du tout la façon dont je parle dans la vidéo, ça fait vraiment gros branleur qui s’en fout de tout (rires). Mais bon, au fond, je n’ai pas changé, je suis toujours comme ça.

Toutes les personnes qui m’ont connu petit, qui ont vu ça, elles ont halluciné.

“Un minot de 13 ans qui dit ça ? Comment c’est possible ?”

Aujourd’hui, j’y suis, ça a marché, ça montre que c’est possible même si ça n’a pas été simple; il y a eu toutes les blessures, les aléas.

Quand je vois cette vidéo, c’est comme un accomplissement pour moi, je suis fier de ce que j’ai fait, vraiment.

Dylan Ferrandis – Supercross Paris 2019 – @Mathieu LifestyleFilms

Tu peux. Quelques questions rapides, et je te laisse tranquille. L’aspect qui te déplaît le plus dans ton métier ?

De ne pas avoir le temps de profiter sur des événements exceptionnels comme le Motocross des Nations, les Supercross, comme la finale de Vegas. Quand tu es un athlète qui veut gagner, c’est la chose la plus difficile à gérer.

Une anecdote de ta saison 2020 ?

J’en ai trop, c’est un truc de fou. Allez, je vais t’en dire deux.

Le lundi ou mardi à l’entraînement avant Oakland, je roule sur un terrain de Supercross public et au deuxième tour, je me mets cours sur un gros triple, rien de méchant, mais ça tape un peu. Bizarre. Je me dis que je suis froid, c’est le matin, rien de grave.

Je fais mon entraînement, et une heure plus tard, entre deux chronos avec David, je commence à avoir des douleurs au dos, à l’épaule, au cou, impossible de bouger. Je m’arrête, je galère à me déshabiller, je me suis déplacé les cervicales 5 jours avant Oakland.

Je passe le reste de la semaine sur le canapé jusqu’à la course, ostéo, glace, j’étais comme un vieux, bloqué complet. Le jour de la course, je fais le moins de tour possible aux essais. Lors de la course, je suis second derrière Forkner et je me dis que ça va être vraiment dur, mais au final, je trouve mon rythme, je roule sans me presser et je parviens à le doubler et à gagner la finale, trop bon, exceptionnel. On peut voir sur les images que ce soir-là, j’étais vraiment heureux, c’était improbable.

À San Diego, en finale, je suis de nouveau second derrière Forkner. À deux reprises, sur un enchaînement double-triple-triple, je fais un point mort à la réception du double. Du coup, je m’envole à moitié sur l’avant sur le triple, mais je ne tombe pas, il ne s’est rien passé et je parviens quand même à revenir à chaque fois sur Austin, avant de le doubler et de gagner la finale.

Ça, il n’y a que moi qui le sait, mais dans des jours comme tu te dis que tu n’étais pas censé gagner. Réussir à gagner comme ça, c’est exceptionnel, c’est ça qui fait que je suis heureux à l’arrivée.

Dylan Ferrandis Wins in Last Lap Pass at Anaheim 2 · Kickin' The Tires

Dylan Ferrandis – 2020 – @Yamaha

Un pilote contre qui tu éviterais l’affrontement ?

Contre l’homme le plus fort actuellement, et c’est Jeffrey Herlings, il n’y a pas photo. Si je peux éviter de l’affronter …. Ou alors en Supercross, ça ne me dérange pas [rires].

Pas d’affrontement contre Herlings à Lommel du coup ? [rires]

Avec beaucoup d’entraînement, je pense qu’il y aurait moyen de rivaliser sur quelques tours, mais non, je pense que ce n’est pas possible. Je ne sais pas trop, je n’y suis plus. Mais on sait tous comment ça terminerait.

Une journée chez Pastrana où une journée au Stewart Compound ?

Travis Pastrana. Moi, j’ai envie de faire des backflips dans la mousse, sauter sur l’airbag. Ça fait rêver depuis gamin. Chez James, ça fait rêver aussi, mais faire des tours sur un terrain, je fais ça tous les jours, si j’ai l’occasion de faire un truc différent, alors je saute dessus.

Un truc qui te terrifie ?

Si on reste dans le milieu de la moto. Avoir un problème mécanique à l’appel d’un saut en Supercross, c’est ma phobie. C’est ce qui te fait faire des cauchemars quand tu es pilote pro.

Quand tu raccrocheras les gants, est-ce que le fait de ne pas avoir eu de titre en mondial sera un de tes regrets ?

Absolument pas. Ne pas avoir de titre du tout, ça aurait été le plus gros regret de ma vie, là, j’en ai un. C’est un titre en Supercross, ce dont j’ai toujours rêvé, si j’arrête demain, je serai satisfait de ma carrière quoi qu’il arrive.

Si on t’avait demandé de choisir entre un titre en mondial et un titre en SX US, tu aurais choisi le titre en SX ?

Je pense, oui

Comment on explique ta position moyenne de départ en cette saison 2020 – 8.2 – la plus mauvaise de tout le top 5. C’est la dernière, il faut bien que je termine comme ça.

[rires] … Si on prend la première moitié du championnat, j’ai une explication pour les trois premières épreuves. Si on regarde la moyenne de départ sur les courses suivantes, je pense que c’est déjà beaucoup mieux.

En début de saison, on a fait des mauvais choix techniques, on a négligé des réglages très importants sur la moto de course avec le team et on en a payé le prix lors des trois premières épreuves. On a rectifié le tir et sur les trois dernières épreuves, c’était beaucoup mieux.


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