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Une course, une histoire – Khoun Sith Vongsana


Dans le but de me diversifier, je vous propose désormais “Une course, une histoire”; la nouvelle rubrique qui voit le jour sur le site. L’objectif de cette dernière, replonger dans la mémoire de nos pilotes tricolores pour leur en  faire ressortir des anecdotes, des histoires insolites ou simplement plonger au cœur d’un moment marquant de leur carrière.

Pour ouvrir le bal, j’ai été tailler le bout de gras avec Khoun Sith Vongsana, dont vous vous souvenez évidemment. Le Français était, en 2007, le jeune espoir montant qui dominait les manches de l’Europe 250 en se frottant à Gautier Paulin, Marvin Musquin et compagnie … Khoun Sith a décidé de nous raconter les galères rencontrées lors de cette fameuse saison, alors qu’il évoluait pour le compte de KTM France.

Khoun Sith Vongsana: “Lors de la saison 2007, je roulais pour KTM France et on avait prévu de faire le début de l’Europe 250, pas tout le championnat, car on ne savait pas trop si j’allais rouler devant. Le début du championnat se déroule bien, je suis en tête.

Arrive le grand prix de Suède. Je rentre en premier sur la grille et, comme à mon habitude, je coupe le moteur en attendant que tout le monde prenne place et je la redémarre quand le dernier pilote arrive sur la grille. Lors du panneau 15 secondes, ma moto coupe nette. J’ai kické, kické, kické, jusqu’à ce que les autres finissent le premier tour. J’avais cassé le moteur sur la grille de départ de la première manche, première manche blanche.

Place à la 5ème épreuve du championnat à Brou, en France. Le samedi, Marvin Musquin nous tourne autour, nous colle un bon gros chrono aux essais et moi, je signe le second temps. Dans la nuit, il se met à pleuvoir des sceaux d’eaux et il a plu toute la journée du dimanche. Je crois que je n’ai même pas pris part au Warm-up du dimanche matin. Je décide de partir 45 minutes avant la course sur la grille, avec mon parapluie et un énorme rouleau de papier, je voulais creuser ma trace pour trouver du sec avant d’y mettre une tonne de papier pour pouvoir partir sur de la terre sèche, ça m’aurait donné un bon avantage pour mieux partir. Je me fais chier comme pas possible mais j’arrive à faire ce que je veux, je trouve le sec et je mets le papier. Je remonte en pré-parc le moment venu, personne, pas de mécano, pas de moto.

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Je regarde les mécanos de Marvin et je leur demande où sont les miens; ils me répondent qu’ils ne sont pas venus. Je me dis qu’ils me font une blague avant de me rendre compte que ce n’en est pas une. J’attends un peu, la course allait bientôt commencer. Alors que je me décide d’aller les voir, je les vois bloqués devant la grille du pré-parc, avec ma moto. Je leur demande ce qu’ils foutent, pourquoi ils ne rentrent pas. En fait, ils discutaient, ils n’ont pas vu l’heure, ils ont amené la moto trop tard et je n’ai pas pu faire la première manche.

À l’époque, c’était Deny Phillipaerts qui était second du championnat, le petit frère de Davide; et son équipe avait prévu de porter réclamation si je prenais part à la course, donc mes points auraient sauté. J’avais plus d’un grand prix d’avance à ce stade du championnat et je suis reparti avec une vingtaine de points d’avance de ce grand prix, en terminant second de la deuxième manche.

Arrive ensuite l’épreuve d’Espagne à Alhama de Murcia et KTM ne voulait pas y aller car ça faisait trop loin pour eux, trop de frais. J’y suis allé seul, j’ai pris l’avion avec Loic Rombault et mon père a conduit de chez nous, en Normandie, jusqu’au sud de l’Espagne avec le trafic et les motos.

Je dormais en tente, j’avais une Quechua deux secondes et une douche solaire de camping. Le samedi se déroule plutôt bien et dans la nuit du samedi au dimanche, le matelas gonflable a crevé. Le paddock était fait de grosses caillasses qui ont percé le matelas et j’ai fini par dormir par terre. Evidemment, j’ai super mal dormi et à deux heures du matin, je ne dormais déjà plus.

Je sors de la tente le matin et je vois Gautier Paulin – qui avait dormi dans la grosse semi-remorque du team Martin – qui passe la tête par la fenêtre pour me chambrer “Alors, bien dormi ?”. Je sentais qu’il me narguait et ça m’a mis les nerfs comme jamais. Ce jour-là, j’étais dans un état de grâce, rien ne pouvait m’arriver. Je suis mal parti pendant mes manches mais j’ai doublé tout le monde comme qui rigole, j’ai emplâtré grave, et j’ai remporté les deux manches faciles – la première devant Musquin, la seconde devant Hernandez.

Quelques épreuves plus tard, on va en Hollande, à Markelo, je termine 3ème de la première course et j’étais vraiment content car le sable, ça n’avait jamais été mon point fort. En seconde manche, dans une portion rapide dans les bois, dans le défoncé, je casse l’amortisseur et je me mets un volume énorme dans les vagues; nouvelle manche blanche.

En fin d’année, on va au Danemark, une piste vraiment étrange puisqu’on trouvait du béton et du sable, sans démarcation, on passait du sable au béton d’un coup, c’était l’enfer. Je suis mal parti en première manche, très loin, je cravache pour revenir second dans l’avant-dernier tour, et dans le dernier tour, je casse de nouveau le moteur et j’abandonne.

J’avais plutôt dominé l’Europe cette année là et KTM voulait me signer pour me faire monter en mondial l’année suivante, un beau contrat de 5 ans. La première année, je devais remplacer Jonathan Barragán chez Silver Action avant de basculer dans le team usine les saisons suivantes. Moi, je voulais partir aux USA et je leur ai demandé s’il était possible d’inclure les USA dans ce contrat-là si tout se passait bien. Depuis ce jour-là, Pit Beirer ne nous a plus jamais répondu.

Entre-temps, j’avais dit non à Kawasaki Molson, qui était l’équipe Kawasaki usine à l’époque. KTM voyait que ma saison partait en vrille, que je ne finissais pas les manches à cause de problèmes mécaniques, et le fait que je veuille partir aux USA dans les 5 ans ne leur avait pas plu; donc plus de nouvelles. J’avais décliné Molson et je me suis retrouvé sans rien a terminer troisième de l’Europe alors que j’avais dominé toute la saison.

J’ai finalement signé chez Bud Racing, un contrat pas terrible, pour rouler sur une moto plus que pas terrible, et ça a donné une année 2008 encore pire que pas terrible.”

Une course, une histoire – Khoun Sith Vongsana

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